Portrait d’associée – Julie Bernela

PORTRAIT D’ASSOCIÉE #7

Julie Bernela

JULIE BERNELA, équipe d’appui, Vienne

Chargée d’accompagnement et co-gérante.

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Est-ce que tu peux me parler de ton métier ?

Je suis chargée d’accompagnement depuis la création de Consortium Coopérative. C’est un métier qui est arrivé par hasard : j’ai découvert les CAE en 2014 et on en a créé une en 2015. Ça a été assez rapide.

C’est venu d’une rencontre avec Christine [Graval, cogérante]. A l’époque, elle était salariée d’une association, un bureau de production dans le secteur culturel sur Poitiers. Elle recherchait une personne pour mener une étude de préfiguration pour la création d’une CAE. J’ai été salariée de l’association pour mener l’étude.

A la fin de celle-ci, en 2015, on a décidé de créer la coopérative. Il n’y a pas eu de réel temps mort entre l’étude et la création de la coopérative en statut SCOP.

Tout l’intérêt d’une CAE, c’est d’avoir une équipe d’appui qui est là pour accompagner les porteurs de projets, entrepreneurs, quelle que soit leur expérience. C’est ça qui en fait la richesse. Dans une coopérative se côtoient des profils variés et c’est aussi ça qui nourrit des projets communs.

Et c’est comme ça que sont nés des projets collectifs comme le catalogue d’ateliers Le Plongeoir ou la boutique Plage 76.

Pourquoi vous avez choisi ce type de structure, une SCOP ?

Quand on crée une CAE, par définition, c’est une coopérative, mais qui pouvait avoir un statut soit de SCOP, soit de SCIC.

C’était plus simple de choisir un modèle SCOP – qui nécessite au minimum deux associés salariés – qu’un modèle SCIC, qui nécessitait d’embarquer avec nous d’avantage de collectivités.

Et pourquoi une CAE ?

Pendant l’étude de préfiguration qu’on a menée entre 2014 et 2015, on a pu rencontrer à la fois des partenaires, des porteurs de projets du secteur culturel et des réseaux d’artistes. On s’est rendu compte que ça répondait bien à une problématique qu’un certain nombre d’entre-eux rencontraient. Ça a conforté l’idée que la création d’une CAE sur le territoire Poitou-Charentes était cohérente avec les besoins du territoire.

Le contexte était assez favorable en 2015, la Région soutenait financièrement les CAE existantes, puisque c’est une mission d’intérêt général qu’on réalise au quotidien. C’est ce travail là qu’on a dû faire au fur et à mesure des années : convaincre les pouvoirs publics de l’intérêt de nous soutenir et présenter le modèle CAE à toutes les personnes rencontrées (entrepreneurs, étudiants, salariés, etc.) et les convaincre de l’intérêt de rejoindre une CAE pour leur projet professionnel. Aujourd’hui encore, les CAE sont très méconnues.

Qu’est-ce que la coopérative t’apporte, aussi bien personnellement que professionnellement ?

Ça a été mon premier vrai projet professionnel. C’est un projet qui est enrichissant, qui est motivant, on ne s’ennuie pas quand on est membre de l’équipe d’appui d’une CAE !

Il faut aussi doser sur le temps consacré et la conciliation entre vie privée et vie perso. Ce projet professionnel, c’est un projet qui est très ambitieux, un projet dont on est fier. Finalement, c’est un peu notre bébé !

La coopérative a eu six ans cet été. On a confiance en ce projet et on se dit qu’on pourra fêter les dix ans. Ce type d’entreprise, qui mérite d’être connu d’avantage, a de l’avenir.

Un certain nombre d’associés qui sont là depuis 2016, 2017 sont encore là aujourd’hui. Ça veut dire que leur projet professionnel a pu se concrétiser, a pu se développer au sein de la coopérative et que c’est un outil qui est intéressant.

On propose un cadre. Quand on présente en réunion d’information la coopérative, on en vend les mérites. On essaye aussi, au fur et à mesure, de créer de nouveaux avantages de mutualisation, de projets collectifs.

On a quand même une pression de faire vivre le projet correctement et d’être au bénéfice du plus grand nombre. Donc, oui, il y a parfois un peu de poids qui pèse sur nos épaules.

On a fait le choix d’une cogérance avec Christine, justement pour ne pas être seule à porter toutes ces responsabilités-là.

Et professionnellement, c’est très très riche de rencontres humaines, tout simplement. On rencontre à la fois des entrepreneurs, d’autres équipes, d’autres gérants de CAE…

Tu arrives à faire une coupure vie personnelle / vie professionnelle ?

Oui, je m’y contrains de plus en plus depuis que j’ai des enfants. C’est vrai que ça n’a pas toujours été facile de jongler, entre les deux. On conseille aussi aux entrepreneurs de réussir à faire cette séparation. Il faut donc qu’on prenne soin les uns des autres, en tant que collègues, et qu’on sache être vigilants.

Est-ce que tu peux me parler de projets ou de rencontres qui t’ont marquée depuis la création de la coopérative ?

Il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de rencontres. Il y a des rencontres qui ont été assez éphémères, des personnes qu’on a vues seulement quelque fois, qu’on a accompagnées pendant six mois et qui sont parties très vite de la coopérative.

Et puis les rencontres qu’on a faites d’entrepreneurs qui sont là depuis quelques années, ce ne sont même plus des rencontres, c’est notre quotidien, c’est la concrétisation du projet, donc c’est assez fort.

Et forcément, on fait aussi des rencontres dans nos espaces de travail par exemple aux Usines.

Je n’ai pas une rencontre plus qu’une autre à valoriser…

Ce qui m’inspire aussi, c’est le collectif et les projets collectifs qui sont encore plus enthousiasmants. À Plage 76, par exemple : ce qui s’est joué ; c’est assez fort de se dire que ça a plus de trois ans d’existence. C’était un projet qui n’était pas éphémère, mais on ne savait pas non plus si ça prendrait ou si ça fonctionnerait. Et ça, ça s’est fait parce qu’il y a eu quand même une dizaine de personnes qui se sont investies sur le projet au démarrage et que ça a pu aboutir à quelque chose d’assez intéressant.

Et comment tu vois l’avenir en tant qu’associée ?

Pour l’instant, je n’ai pas de date butoir de sortie de la coopérative. C’est vrai que tant que le projet roule, c’est chouette et je souhaite y rester.

Après, c’est plus sur le volet de cogérance, où je pense que j’aimerais un jour passer la main en restant salariée de la coopérative. Et puis, sur la cogérance, on a fait le choix d’être à deux. Ça pourrait être aussi à trois. Il peut y avoir un binôme équipe d’appui / entrepreneur. On peut imaginer plein de choses…

Il peut y avoir des idées neuves et des idées de développement, c’est ça qui est intéressant, c’est aussi tout le volet expérimentation qui peut se faire sur des territoires, sur des projets spécifiques. On est assez libre de tenter des choses et finalement, pour l’instant, tout ce qu’on a tenté, ça a plutôt bien marché.

Il ne faut pas avoir peur de l’échec non plus. Et c’est pour ça qu’on invite les coopérateurs et les entrepreneurs qui n’ont pas un projet très défini, mais qui ont ça dans la tête depuis dix ans à venir le tester. Et s’il faut faire une croix dessus, ils font la croix dessus après le contrat CAPE mais ils n’ont pas de regrets de n’avoir jamais tenté l’aventure au cours de leur vie.

Est-ce que tu aurais quelque chose à rajouter pour les personnes qui vont lire ton interview et qui peut-être hésiteraient à se lancer?

On propose régulièrement des réunions d’information. Il ne faut pas hésiter à nous contacter.

C’est vrai qu’il y a eu certaines périodes où on était un peu moins disponibles et peut-être qu’on n’a pas fait de réponse systématique à toutes les personnes qui ont pris contact avec nous. Si elles sont passées entre les mailles du filet, qu’elles n’hésitent pas à revenir vers nous pour qu’on échange sur leurs projets et puis on saura leur dire si ça peut coïncider avec la coopérative.

Ce n’est vraiment pas de la perte de temps que de se poser la question.

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Entretien réalisé au cours de l’été 2021, par Zoé Moreau.
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